• Comment se fabriquent, je vous demande, les idoles dont se peuplent tous les rêves des générations d'aujourd'hui ? Comment le plus infime crétin, le canard le plus rebutant, la plus désespérante donzelle, peuvent-ils se muer en dieux ?... déesse ? recueillir plus d'âmes en un jour que Jésus-Christ en deux mille ans ? ... Publicité ! que demande toute la foule moderne ? Elle demande à se mettre à genoux devant l'or et devant la merde !... Elle a le goût du faux, du bidon, de la farcie connerie, comme aucune foule n'eut jamais dans toutes les pires antiquités... Du coup, on la gave, elle en crève... Et plus nulle, plus insignifiante est l'idole choisie au départ, plus elle a de chances de triompher dans le coeur des foules... mieux la publicité s'accroche à sa nullité, pénètre, entraîne toute l'idolâtrie... Ce sont les surfaces les plus lisses qui prennent le mieux la peinture. On fabrique un Joseph Staline comme une Joan Crawford, même procédé, même culot, même escroquerie. Les malheurs du pauvre exploité, du calicot de chez Bader, du forçat de chez Citroën, Chaplin comme il peut s'en foutre, lui, plein de milliards... Vive l'excellente jérémiade ! Vivent les temps modernes !

    "Bagatelles pour un massacre" Céline *

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  • Yeux :
    Attention

     A d’autres l’univers paraît honnête. Il semble honnête aux honnêtes gens parce qu’ils ont des yeux châtrés. C’est pourquoi ils craignent l’obscénité. Ils n’éprouvent aucune angoisse s’ils entendent le cri du coq ou s’ils découvrent le ciel étoilé. En général, on goûte les « plaisirs de la chair » à la condition qu’ils soient fades.

    Mais, dés lors, il n’était plus de doute : je n’aimais pas ce qu’on nomme « les plaisirs de la chair », en effet parce qu’ils sont fades. J’aimais ce que l’on tient pour « sale ». Je n’étais nullement satisfait, au contraire, par la débauche habituelle, parce qu’elle salit seulement la débauche et, de toute façon, laisse intacte une essence élevée et parfaitement pure. La débauche que je connais souille non seulement mon corps et mes pensées mais tout ce que j’imagine devant elle et surtout l’univers étoilé…

    Histoire de l'oeil de Georges Bataille *

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  • Il y a des écrivains qui parfois parviennent à effleurer la vérité après plusieurs livres, à la frôler du bout des doigts dans le meilleur des cas. Il y en a d'autres, très peu, qui disent tout en trois lignes. Quelques phrases qui font l'effet d'un coup de poing en pleine face, une pertinence qui touche au sublime, un paragraphe en feu qui tombe du ciel et écrase tout sur son passage. Des mots nucléaires de la puissance d'une bombe...

     

    "Une telle connerie dépasse l’homme. Une hébétude si fantastique démasque un instinct de mort, une pesanteur au charnier, une perversion mutilante que rien ne saurait expliquer, sinon que les temps sont venus, que le Diable nous appréhende, que le Destin s’accomplit. Nous crevons d’être sans légende, sans mystère, sans grandeur. Les cieux nous vomissent."

    Les Beaux Draps, Louis-Ferdinand Céline * *

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