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    Beau fantôme de l'innocence,
    Vêtu de fleurs,
    Toi qui gardes sous ta puissance
    Une âme en pleurs !
    Ô toi qui devanças nos hontes
    Et nos revers,
    Es-tu si grand que tu surmontes
    Tout l'univers !
    Le reste, comme la poussière,
    S'est envolé,
    Devant le feu de ma paupière
    Tout s'est voilé,
    Tout s'est enfui, flamme et fumée,
    Tout est au vent ;
    Toi seul sur mon âme enfermée
    Planes souvent.
    Pour courir à ta voix qui crie :
    « Éternité ! »
    Pour monter à Dieu que je prie,
    J'ai tout jeté.
    La nuit, pour chasser un mensonge
    Qui me fait peur,
    Ta main, plus forte que le songe,
    Étreint mon coeur.
    Quelle absence est assez profonde
    Pour te braver,
    Quand ton regard perce le monde
    Pour nous trouver ?
    De mon âme ont jailli des âmes
    Dignes de toi :
    Au milieu de ces pures flammes,
    Ressaisis-moi !
    Beau fantôme de l'innocence
    Vêtu de fleurs,
    Oh ! Garde bien en ta puissance
    Notre âme en pleurs.
     
    Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)
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  • Toi le féminin
    Ne nous délaisse pas
    Car tout ce qui n'est pas mué en douceur
    ne survivra pas

    Toi qui survivras
    Révèle-nous ton mystère que peut-être
    Toi-même tu ignores
    sinon le mystère ne serait pas

    N'est-ce pas que le printemps est empli
    d'oiseaux dont l'appel se perd au loin
    Que l'été nous écrase de son incandescence
    sont la senteur nous poigne jusqu'aux larmes
    Que l'automne nous laisse désemparés
    par son trop-plein de couleurs, de saveurs
    Que l'ultime saison rompt le cercle
    Nous plongeant dans l'abîme
    de l'inguérissable nostalgie

    Mais en toi demeure le mystère que peut-être
    toi-même tu ignores
    En toi ce que est perdu, ce qui est à venir
    Étant d'avant la pluie au furtif nuage
    Colline après l'orage au contour plein

    Ne nous délaisse pas
    Toi le féminin
    Hormis ton sein
    quel lieu pour renaître ?

    "Le livre du Vide médian"  François Cheng *

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    Enfants ! ma voix s'enferme trop souvent.    
    Vous grandissez, impatients d'orage ;
    Votre aile s'ouvre, émue au moindre vent.
    Affermissez votre raison qui chante ;
    Veillez sur vous comme a fait mon amour ;
    On peut gronder sans être bien méchante :
    Embrassez-moi, grondez à votre tour.

    Vous n'êtes plus la sauvage couvée,
    Assaillant l'air d'un tumulte innocent ;
    Tribu sans art, au désert préservée,
    Bornant vos voeux à mon zèle incessant :
    L'esprit vous gagne, ô ma rêveuse école,
    Quand il fermente, il étourdit l'amour.
    Vous adorez le droit de la parole :
    Anges, parlez, grondez à votre tour.

    Je vous fis trois pour former une digue
    Contre les flots qui vont vous assaillir :
    L'un vigilant, l'un rêveur, l'un prodigue,
    Croissez unis pour ne jamais faillir,
    Mes trois échos ! l'un à l'autre, à l'oreille,
    Redites-vous les cris de mon amour ;
    Si l'un s'endort, que l'autre le réveille ;
    Embrassez-le, grondez à votre tour !

    Je demandais trop à vos jeunes âmes ;
    Tant de soleil éblouit le printemps !
    Les fleurs, les fruits, l'ombre mêlée aux flammes,
    La raison mûre et les joyeux instants,
    Je voulais tout, impatiente mère,
    Le ciel en bas, rêve de tout amour ;
    Et tout amour couve une larme amère :
    Punissez-moi, grondez à votre tour.

    Toi, sur qui Dieu jeta le droit d'aînesse,
    Dis aux petits que les étés sont courts ;
    Sous le manteau flottant de la jeunesse,
    D'une lisière enferme le secours !
    Parlez de moi, surtout dans la souffrance ;
    Où que je sois, évoquez mon amour :
    Je reviendrai vous parler d'espérance ;
    Mais gronder... non : grondez à votre tour !

    Marceline Desbordes-Valmore, Bouquets et prières *

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     Voyez-vous ce blessé qui se tord sur la terre?
    Il va mourir ici, près du bois solitaire,
    Sans que de sa souffrance un seul cœur ait pitié;
    Mais ce qui doublement fait saigner sa blessure,
    Ce qui lui fait au cœur la plus âpre morsure,
    C’est qu’en se souvenant, il se sent oublié.
    M. Lermontov

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    Ta bouche

     

    Ta bouche a deux façons charmantes de causer,
    Deux charmantes façons : le rire et le baiser.

    Si vous voulez savoir celle que je préfère,
    J’aime mieux celle-ci, mais l’autre m’est plus chère.

    Albert Mérat *

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