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  • Mai 1941, Hannah Arendt et Heinrich Blücher débarquent à New York. Déterminée à comprendre ce qui s’est passé, Hannah Arendt rédige Les Origines du Totalitarisme, part en Allemagne identifier les biens juifs spoliés et couvre le procès d’Eichmann à Jérusalem. L’action devient le cœur de sa pensée.

    Une série documentaire produite par Christine Lecerf réalisée par Julie Beressi

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  • J'ai grandi dans une ville où, pendant deux siècles, pour gagner son pain, il fallait aller le chercher dans la gueule rougeoyante des hauts-fourneaux. L'usine recouvrait tout.

    Même les moineaux étaient aux couleurs des Schneider. Un empire aussi puissant est équivalent à un désert : le coeur s'y simplifie, l'âme s'y aiguise. Cette ville réputée pour la brutalité et le vacarme de son industrie fut pour moi aussi paisible qu'un monastère dont, pendant mes vingt premières années, je n'ai habité qu'une toute petite partie - une chambre et une cour grise que des hortensiais éclairaient sourdement de leurs vapeurs bleues. L'éclat du ciel réverbéré par leurs pétales est mon plus profond souvenir. Cette lumière bleutée entrait au matin comme une reine dans ma chambre de petit pénitent.

    Cette ville est un géant allongé dans une plaine. Ses bras lancés loin de son corps, sa tête posée sur une colline, il dort, écrasé par deux siècles de labeur. Les rêves qu'il enfante sont en acier trempé. J'ai grandi dans une poche du gilet de cet homme. Chaque nuit je sentais sa respiration encombrée, les battement cardiaques du marteau-pilon, mais ce n'était pas cette terre, cette usine et cette histoire qui m'étonnaient. C'était le ciel et la très pure idée de la vie qui vient quand on le contemple à temps perdu. A peine a-t-on tourné la tête qu'il a déjà changé de couleur et de forme, comme un enfant qu'on ne pourrait laisser un instant sans surveillance.

    J'ai toujours en moi la sensation vive de l'éclat argenté des nuages qui passaient au-dessus de la cour, des croisillons de bois vert tendre auxquels s'accrochait un rosier souffreteux entretenu par le voisin, et du temps surtout, du temps qui coulait devant mes yeux sans m'emporter.

    C. Bobin "Prisonnier au berceau"

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