• La Cafetière (10)

    L’alouette chanta, une lueur pâle se joua sur les rideaux.

    Aussitôt qu’Angéla l’aperçut, elle se leva précipitamment, me fit un geste d’adieu, et, après quelques pas, poussa un cri et tomba de sa hauteur.

    Saisi d’effroi, je m’élançai pour la relever… Mon sang se fige rien que d’y penser : je ne trouvai rien que la cafetière brisée en mille morceaux.

    À cette vue, persuadé que j’avais été le jouet de quelque illusion diabolique, une telle frayeur s’empara de moi, que je m’évanouis. 

    Lorsque je repris connaissance, j’étais dans mon lit ; Arrigo Cohic et Pedrino Borgnioli se tenaient debout à mon chevet.

    Aussitôt que j’eus ouvert les yeux, Arrigo s’écria :

    — Ah ! ce n’est pas dommage ! voilà bientôt une heure que je te frotte les tempes d’eau de Cologne. Que diable as-tu fait cette nuit ? Ce matin, voyant que tu ne descendais pas, je suis entré dans ta chambre, et je t’ai trouvé tout du long étendu par terre, en habit à la française, serrant dans tes bras un morceau de porcelaine brisée, comme si c’eût été une jeune et jolie fille.

    — Pardieu ! c’est l’habit de noce de mon  grand-père, dit l’autre en soulevant une des basques de soie fond rose à ramages verts. Voilà les boutons de strass et de filigrane qu’il nous vantait tant. Théodore l’aura trouvé dans quelque coin et l’aura mis pour s’amuser. Mais à propos de quoi t’es-tu trouvé mal ? ajouta Borgnioli. Cela est bon pour une petite-maîtresse qui a des épaules blanches ; on la délace, on lui ôte ses colliers, son écharpe, et c’est une belle occasion de faire des minauderies.

    Suite...