• La Cafetière (7)

    La pendule sonna une heure ; ils s’arrêtèrent. Je vis quelque chose qui m’était échappé : une femme qui ne dansait pas.

    Elle était assise dans une bergère au coin de la cheminée, et ne paraissait pas le moins du monde prendre part à ce qui se passait autour d’elle.

    Jamais, même en rêve, rien d’aussi parfait ne s’était présenté à mes yeux ; une peau d’une blancheur éblouissante, des cheveux d’un blond cendré, de longs cils et des prunelles bleues, si claires et si  transparentes, que je voyais son âme à travers aussi distinctement qu’un caillou au fond d’un ruisseau.

    Et je sentis que, si jamais il m’arrivait d’aimer quelqu’un, ce serait elle. Je me précipitai hors du lit, d’où jusque-là je n’avais pu bouger, et je me dirigeai vers elle, conduit par quelque chose qui agissait en moi sans que je pusse m’en rendre compte ; et je me trouvai à ses genoux, une de ses mains dans les miennes, causant avec elle comme si je l’eusse connue depuis vingt ans.

    Mais, par un prodige bien étrange, tout en lui parlant, je marquais d’une oscillation de tête la musique qui n’avait pas cessé de jouer ; et, quoique je fusse au comble du bonheur d’entretenir une aussi belle personne, les pieds me brûlaient de danser avec elle.

    Cependant je n’osais lui en faire la proposition. Il paraît qu’elle comprit ce que je voulais, car, levant vers le cadran de l’horloge la main que je ne tenais pas :

    — Quand l’aiguille sera là, nous verrons, mon cher Théodore.

    Suite...