• CRISE DE LA NOBLESSE

     

    9. NOBLESSE DE SANG ET NOBLESSE DU FUTUR

        La noblesse repose sur la beauté du corps, de l’âme, et de l’esprit ; la beauté repose sur l'harmonie
     accomplie et la vitalité augmentée : quiconque surpasse son environnement en ces domaines, est
    aristocrate.
        L’ancien type aristocratique est en voie d’extinction ; le nouveau n’est pas encore constitué. Notre temps intermédiaire est pauvre en grandes personnalités : en beaux humains ; en nobles humains ; en sages humains.
    Pendant ce temps, des épigones de la noblesse en naufrage usurpent les formes mortes de l’aristocratie passée et les remplissent avec le contenu de leur misérable bourgeoisie .
    La vie pleine et dure de la noblesse du passé a été transmise à des arrivistes : il leur manque pourtant ses formes, sa distinction, sa beauté.
        L’époque n’a cependant pas à se soucier de l’idée de noblesse, de l’avenir d’une noblesse. Si l’humanité veut avancer, elle a besoin de leaders, de professeurs, de guides ; de réalisations de ce qu’elle veut devenir ; de précurseurs de son élévation à venir vers de plus hautes sphères. Sans noblesse, pas d’évolution.
     Une politique démocratique peut être eudémoniste — une politique évolutionniste doit être aristocratique.
    Pour s’élever, pour avancer, des buts sont nécessaires ; pour atteindre des buts, des humains sont nécessaires, qui posent des buts, qui mènent aux buts : des aristocrates.
        L’aristocrate en tant que leader est un concept politique ; le noble en tant que modèle est un idéal esthétique. La plus haute exigence requiert que l’aristocratie s’accorde avec la noblesse, le leader avec le modèle : que le leadership échoit à des humains accomplis.
        De l’européenne humanité de quantité, qui ne croit qu’au chiffre, qu’à la masse, se distinguent
    deux races de qualité  : la noblesse de sang  et le judaïsme .  Séparées l’une de l’autre, chacune demeure fixement rivée à sa croyance en sa plus haute mission, en son     meilleur sang, en une différence de rang humaine. Dans ces deux races avantagées hétérogènes réside le noyau de la noblesse européenne du futur : dans la noblesse de sang féodale, si tant est qu’elle ne se laisse pas
    corrompre par la cour, dans la noblesse cérébrale juive, si tant est qu’elle ne se laisse par corrompre par le capital. Comme garantie  d’un meilleur futur, il demeure un reste de noblesse rustique moralement  haute, et un petit groupe combattant de l’intelligentsia révolutionnaire. C’est ici que grandit au rang de symbole, la communauté entre Lénine,  l’homme de la petite noblesse rurale, et
    Trotski,  le lettré juif : ici se réconcilie l’opposition entre le caractère et l’esprit, le junker et le lettré, les humains rustiques et les humains urbains, les païens et les chrétiens, en une synthèse créatrice de l’aristocratie révolutionnaire.

    Un pas de plus vers le spirituel suffirait pour mettre au service de la nouvelle libération humaine les meilleurs éléments de la noblesse de sang, qui ont préservé à la campagne leur santé physique et morale des influences dépravantes de l’air de la cour. Les prédestinent en effet à cette prise de position leur  courage traditionnel, leur mentalité antibourgeoise et anticapitaliste, leur sentiment de responsabilité, leur mépris des avantages matériels, leur entraînement stoïcien de la volonté  , leur intégrité, leur idéalisme. Orientées dans des voies plus spirituelles et plus libres, les fortes énergies nobles, qui jusqu’à maintenant ont été des piliers du réactionnisme, pourraient se régénérer en une nouvelle apogée et engendrer des natures de leader, qui allieraient l’inflexibilité de la volonté avec la grandeur d’âme et le désintéressement  ; et au lieu de servir, en représentants  de la bourgeoisie (qui intérieurement les répugne), les intérêts du capitalisme, ils pourraient marcher d’un même pas avec les représentants de la noblesse d’esprit rajeunie, vers la libération et l’ennoblissement de l’humanité.

    La politique a été en Europe, à travers les siècles, le privilège de la noblesse. La haute noblesse formait une caste politique internationale, élevée dans le talent diplomatique. Depuis de nombreuses générations, la noblesse de sang européenne vit dans une atmosphère politique, dont la bourgeoisie a été intentionnellement écartée. Dans les latifundia, le noble apprenait l’art de la gouvernance, de l’administration des humains — dans les postes étatiques de dirigeant, à l’intérieur ou à l’étranger, l’art de l’administration des peuples. La politique est un art, non une science ; son centre de gravité réside plus dans l’instinct que dans l’entendement, dans le subconscient que dans le conscient. Le don pour la politique se laisse éveiller ou cultiver, jamais apprendre. Le génie fait voler en éclats toutes les règles : en termes de talents politiques cependant, la noblesse est plus riche que la bourgeoisie . En effet pour acquérir des connaissances, une seule vie suffit : pour éduquer les instincts, cela nécessite l’action conjointe de beaucoup de générations. Dans les sciences et les beaux-arts, la bourgeoisie surpasse en don la noblesse : en politique la relation est inversée. De là  s’ensuit que même les démocraties d’Europe confient souvent leur politique extérieure à des descendants de leur haute noblesse, car il est dans l’intérêt de l’État de rendre utile à la communauté la masse successorale des dons politiques que la noblesse a accumulée au fil des siècles.

    Les capacités politiques de la haute noblesse découlent principalement de ses forts mélanges de sang. En effet ce mélange national des races agrandit souvent son horizon et paralyse ainsi les conséquences néfastes de la simultanéité castes-consanguinité. La grande majorité des aristocrates de valeur moindre allie les inconvénients du mélange avec ceux de la consanguinité : le manque de caractère avec la pauvreté en esprit ; tandis que dans les rares points culminants de la haute noblesse moderne, les avantages des deux se rencontrent : le caractère avec l’esprit.

    D’un point de vue intellectuel il se creuse à ce jour une violente différence de niveaux entre l’extrême droite (la noblesse de sang conservatrice) et l’extrême gauche (la noblesse d’esprit révolutionnaire), tandis qu’en termes de caractères, ces apparentes extrêmes se touchent. Tout ce qui relève de l’intellect et du conscient réside cependant dans la partie haute — tout ce qui relève du caractéristique et de l’inconscient, dans la partie profonde de la personnalité. Les connaissances et les opinions sont plus faciles à former et réformer que les singularités du caractère et les orientations de la volonté.

    Lénine  et Ludendorff  sont antagonistes dans leurs idéaux politiques : ils sont frères dans leur attitude de volonté . Si Ludendorff avait grandi dans le milieu  révolutionnaire de la jeunesse     estudiantine russe ; il aurait, comme Lénine, vécu dans sa jeunesse l’exécution de son frère par un bourreau impérial : nous le verrions, vraisemblablement, à la tête de la Russie rouge. Tandis que  si Lénine avait été élevé dans une école des cadets prussienne, il serait peut-être devenu un sur-Ludendorff. Ce qui sépare ces deux natures apparentées, c’est leur niveau spirituel. La limitation de Lénine semble être héroïco-consciente, la limitation de Ludendorff naïvo-inconsciente. Lénine n’est pas juste un leader— il est aussi un spirituel; pour ainsi dire, un Ludendorff spiritualisé.
        Le même parallèle peut être dressé entre deux autres représentants  des extrêmes gauche et droite : Friedrich Adler  et Graf Arco. Tous deux ont été meurtriers par idéalisme, martyrs de leur conviction. Si Adler avait grandi dans le milieu militaristo-réactionnaire de la noblesse de sang allemande, et Arco dans le milieu socialisto-révolutionnaire de la noblesse d’esprit autrichienne — alors, vraisemblablement, la balle d’Arco aurait atteint le ministre-président Stürgkh, la balle d’Adler le ministre-président Eisner. En effet eux aussi sont frères, séparés par la différence des préjugés inculqués, alliés par le point commun du caractère héroïco-désintéressé. Ici aussi la différence se situe au niveau spirituel (Adler est
    l’humain d’esprit), et non au niveau de la pureté de la mentalité . Qui loue le caractère de l’un, ne peut
    rabaisser celui de l’autre — comme cela se produit pourtant quotidiennement des deux côtés.
        Où il y a de la force de vie potentialisée ,  il y a de l’avenir. L’apogée  de la paysannerie, le noble terrien, a (tant qu’il s’est maintenu en bonne santé) rassemblé et accumulé une abondance de forces vitales au fil de sa symbiose millénaire avec la nature vivante et donneuse de vie. Si une éducation moderne réussissait à sublimer en spirituel une partie de cette énergie vitale augmentée : alors la noblesse du passé pourrait peut-être prendre une part décisive à la construction de la noblesse du futur.  En allemand les termes Blut(e)   et Blüte  ont une consonance proche, voire une étymologie commune (Bluot , ce qui coule). Si cette étymologie commune est à prendre avec prudence, elle est néanmoins mentionnée dans certains dictionnaires allemands de la fin du XIXe. Les résonances sémantiques découlant de cette proximité, different des résonances sémantiques associées au terme
    sang,  en français.

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